Je commence ici une rubrique Interview où nous pourrons rassembler les interviews des acteurs, réalisateurs, scénaristes et autre staff de Retour vers le futur.
Voici donc une interview de Bob Gale pour l'Express datant du 19 octobre 2015 où j'ai encore appris quelques petites choses :
Retour vers le futur: "Les contraintes vous rendent plus créatif"
Retour vers le futur fête ses 30 ans cette année. Soit exactement la distance que parcourt Marty quand il retourne en 1955 et rencontre ses parents. Studio Ciné Live a interviewé son producteur et scénariste Bob Gale, attablé devant une montagne d'oeufs brouillés au Snug Harbor, un restaurant de Santa Monica.
D'après Robert Zemeckis, personne ne voulait de Retour vers le futur, à l'époque. Est-ce vrai?
Bob Gale: Oui, on a essuyé plus de quarante refus. Ce qui n'a rien d'exceptionnel. Regardez les batailles qu'a dû mener Coppola pour Le Parrain: la Paramount voulait un film contemporain, et non pas situé dans les années 40. Ils ne voulaient pas de Brando, pas d'Al Pacino... Personne n'a voulu produire Retour vers le futur avant que Zemeckis ait fait À la poursuite du diamant vert, d'autant que le voyage dans le temps n'était pas synonyme de succès au box-office.
Comment vous est venue l'idée du film?
Bob (Zemeckis) et moi avions toujours voulu raconter une histoire de voyage dans le temps. On a grandi avec la série télé La quatrième dimension, Rod Serling était l'un de nos héros. Mais l'idée a pris forme alors que je rendais visite à mes parents, à Saint Louis, Missouri, durant l'été 1980. À la cave, j'ai trouvé l'annuaire du lycée de mon père. J'ai découvert qu'il avait été délégué de classe, or je détestais le délégué de ma classe. Je me suis dit: "Mince! Si j'avais connu mon père au lycée, aurais-je été ami avec lui?" Il y avait là un film.
En rencontrant ses parents en 1955, Marty met en danger leur couple, et donc sa propre existence. Il y a un aspect franchement oedipien dans ce triangle amoureux...
On a écrit deux versions du scénario pour la Columbia. Ils aimaient le postulat mais trouvaient le film trop gentillet. Eux voulaient des films comme Porky's, Les Bleus ou American College. De la grosse comédie grivoise. On nous a même conseillé d'aller voir Disney. Nous avions essuyé tellement de refus que j'ai fini par penser qu'ils avaient peut-être raison. Donc, nous voilà partis chez Disney; l'ancien Disney d'avant Michael Eisner. On rencontre un cadre du studio et il nous dit: "Vous êtes dingues ou quoi? On ne peut pas faire un film pareil chez Disney! Cette scène où le héros est dans la voiture avec sa mère... C'est de l'inceste."
Pourquoi une voiture, une DeLorean, en guise de machine à voyager dans le temps?
Dans les premières versions du scénario, nous avions une "chambre temporelle". Zemeckis a raconté, dans des interviews, que c'était un genre de frigo, mais ça ressemblait plutôt à une douche. Doc Brown la trimballait sur un camion. Pendant le tournage, Bob s'est rendu compte que ça imposait une logistique compliquée. Il m'a dit: "Et si on en faisait une voiture?" À ce moment-là, on parlait beaucoup de John DeLorean, un type aux prises avec la justice pour trafic de cocaïne. On s'est dit que c'était la voiture parfaite. Avec ses portières papillon, elle évoque une soucoupe volante, ce qu'on a mis à profit dans la scène avec la famille de fermiers, qui pense être attaquée par des envahisseurs de l'espace. Une idée en entraîne une autre.
Comment avez-vous conçu la façon dont Marty s'y prend pour retourner vers le futur?
Dans les premières versions du script, il se rendait sur un site d'essais nucléaires pour exploiter l'énergie d'une explosion. Mais c'était une séquence à un million de dollars. Vingt ans plus tard, Steven Spielberg a récupéré cette idée pour la scène d'ouverture d'Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal. Nous-mêmes l'avions piquée à The Atomic Kid, avec Mickey Rooney (1954). C'est grâce aux restrictions budgétaires qu'on a eu l'idée de l'éclair, de l'horloge, etc. Parfois, les contraintes vous rendent plus créatif. C'est comme Les aventuriers de l'arche perdue: quel est le meilleur moment de ce film?
Quand Indy flingue l'excité du sabre.
Bingo! Ils avaient prévu une scène de bagarre élaborée, mais Steven avait trois jours de retard sur le planning, Harrison se tapait une tourista d'enfer... Ils se sont dit "Et si Indy sortait son pistolet, tout simplement?"
Eric Stoltz avait été recruté pour interpréter Marty McFly. Pourquoi l'avoir remplacé?
Eric Stoltz est un acteur très "intérieur", plus intello que Michael J. Fox. Par exemple, il avait beau se débrouiller avec un skateboard, il était moins convaincant, sur un skate, que Michael.
À quel moment avez-vous réalisé qu'il ne convenait pas?
Dès le départ. Nous avions auditionné Eric et C. Thomas Howell (Outsiders), et tout le monde avait penché pour Howell. Tout le monde, sauf Sid Sheinberg, le président d'Universal. Sheinberg était tellement convaincu par Stoltz qu'il a dit: "Si jamais ça ne marche pas avec lui, vous pourrez le remplacer." Il ne s'attendait pas à ce qu'on le prenne au mot.
Source : http://www.lexpress.fr/culture/cinema/retour-vers-le-futur-les-contraintes-vous-rendent-plus-creatif_1723897.html